Original de l’article : La Croix – Quelques extraits concernant la journée de Claire Martin, pensionnaire de l’INSEP, plus grand centre sportif de France.
7h22 : Le petit déjeuner avant de partir en cours
Le jour ne s’est pas encore levé sur l’Insep, au cœur du bois de Vincennes, au sud-est de la capitale. Ce mardi de novembre, la gymnaste Claire Martin (17 ans) avale sans traîner son petit déjeuner au self. Attablée près de jeunes judokas, la médaillée de bronze à la poutre lors des derniers championnats d’Europe, en avril, a une petite mine.« Je suis fatiguée, glisse-t-elle dans un sourire. C’est dur de se réveiller quand il fait encore nuit comme aujourd’hui. » Le week-end précédent, elle participait, à Marseille, à une compétition internationale.« J’ai intégré l’Insep en 2013, indique Claire, interne de l’établissement qui regroupe l’élite du sport français dans plus de 20 disciplines. C’est ma maison maintenant. J’essaie de rentrer chez mes parents, près de Dijon, tous les mois, mais ce n’est pas toujours possible. »
L’élève de terminale S s’apprête à rejoindre sa salle de cours – sur place à l’Insep, puisque ce sont les professeurs qui se déplacent – pour deux heures de mathématiques et de sciences de la vie et de la terre. La gymnaste, qui vise une qualification pour les Jeux olympiques de Rio, est parfaitement consciente de la nécessité de poursuivre ses études, d’autant que dans sa discipline la question de la reconversion se pose très tôt pour les filles. Après avoir regardé l’heure sur son téléphone, elle quitte le self et presse le pas pour arriver en cours avant la sonnerie.
13h30 : A table
Si les athlètes se côtoient, ils se regroupent généralement par sport, question d’affinités et d’emploi du temps. Une table réunit quelques éléments de l’équipe de France d’athlétisme, un peu plus loin, on reconnaît les hautes silhouettes des basketteuses. Avant ses cours de l’après-midi, Claire Martin déjeune sans s’attarder avec quelques gymnastes. Ils parlent de… gymnastique, de leur dernière compétition, de leurs petites blessures mais aussi de leur prochain devoir sur table au lycée.
14h22 : Cours de Philosophie
Les élèves de terminale S s’installent dans la salle de cours qui offre une jolie vue sur le terrain de football. Ambiance studieuse pour le cours de philosophie autour d’une vaste question : « Toutes les cultures se valent-elles ? » Les 20 élèves, dont pas un seul ne montre des signes de fatigue malgré une matinée chargée, n’hésitent pas à participer. Dans la classe, rien n’indique que nous sommes avec des sportifs de haut niveau, à part peut-être une paire de béquilles posée contre un mur qui rappelle les risques de l’entraînement. Au tableau, un rappel des rendez-vous avec la conseillère d’orientation est affiché, une étape majeure pour ces élèves qui doivent réfléchir à leurs études une fois le bac en poche.
Pas encore fixée sur son orientation, Claire Martin, elle, n’est pas certaine de pouvoir le passer cette année. Si la jeune gymnaste se qualifie pour les Jeux olympiques, elle devra mettre ses études entre parenthèses pour préparer l’événement.
« En ce moment, les cours sont un peu difficiles, glisse-t-elle. Parfois, j’ai l’impression de nager parce que, pour préparer les Mondiaux, j’ai été déscolarisée,» Pour rattraper ce retard, elle va aménager son emploi du temps pour bénéficier d’une heure de cours en plus par jour au moins jusqu’à Noël.
17h24 : Tous au agrès
La musique retentit dans la grande salle de gymnastique artistique pour l’entraînement des équipes de France féminine et masculine. Claire Martin s’exerce à la poutre, son agrès de prédilection. La médaillée de bronze aux derniers championnats d’Europe fait admirer sa souplesse. Légèrement touchée à la cheville, la jeune Dijonnaise se préserve un peu.« On revient d’un week-end compétition, donc l’entraînement est un peu allégé », indique-t-elle. Trois entraîneurs font passer leur consigne, dont les Chinois Jianfu Ma et Hong Wang, anciens entraîneurs du pôle Espoirs de Dijon où est passée Claire.
Ils encouragent et applaudissent la toute jeune Coline Devillard (15 ans), surnommée « Coco », lorsqu’elle réussit une figure à la poutre. L’adolescente, originaire de Saône-et-Loire, qui n’est pas la dernière à faire rire ses copines, cache une grande force de caractère : « Au début, c’était dur d’être loin de mes parents, je les appelais plusieurs fois par jour, mais aujourd’hui, ça va mieux. »
Jusqu’au terme de l’entraînement, les gymnastes enchaînent les exercices sans jamais rechigner ou regarder l’heure malgré la fatigue. Elles iront ensuite dîner avant de passer entre les mains expertes et réparatrices du kinésithérapeute.
21h30 : Retour à la « maison »
La nuit est tombée depuis longtemps sur l’Insep. Claire Martin rejoint enfin sa chambre individuelle. « Je commence à être fatiguée », confie-t-elle dans un sourire entendu. Pourtant, sa journée n’est pas encore terminée.
Avant de se coucher, elle va réviser une petite demi-heure pour préparer ses devoirs sur table du lendemain. Si, bien souvent, elle se rend dans la chambre de ses acolytes de la gymnastique ou vice versa, elle ne se couche pas plus tard que 22 h 30, après s’être offert un moment de détente en regardant un film sur son ordinateur.
Consciente d’avoir une vie différente de la plupart des jeunes de son âge, la Dijonnaise n’en changerait pour rien au monde. « Le moment le plus pénible dans ma journée à l’Insep ? Le réveil !, plaisante-t-elle. Je ne me suis jamais dit que cette vie était trop dure parce que je fais ce que j’aime. Je ne serais pas heureuse dans une autre vie sans la gym. Avoir un objectif à long terme, m’entraîner dur, me surpasser tous les jours, ça me plaît. »
Un très beau reportage photo en vidéo ici
Une journée type d’une gymnaste à l’INSEP se déroule de la façon suivante
- 7h45 – 9h45 : Cours
- 10h – 13h : Entraînement
- 14h15 – 16h15 : Cours
- 16h30 – 19h : Entraînement